« Rien n’est permanent, sauf le changement » nous enseignait Héraclite. Du changement à l’incertitude, il n’y a qu’un pas. Et la complexité n’est jamais très loin. Dans le livre « Le management de la complexité », fruit d’un travail de recherche de trois ans mené dans le cadre d’un DBA (Doctorate of business administration), je présente sept clés pour mieux affronter la complexité du monde actuel. Dans cet article, je propose un résumé de la 2e clé : le temps.
Combien de fois n’ai-je entendu chez des managers, dirigeants ou commentateurs que le temps accélérerait ? À les écouter, cette accélération semblait responsable du sentiment de complexité du monde actuel. Non, le temps ne s’accélère pas, ce n’est pas possible. Le temps, en tout cas la façon dont on a décidé de lui donner une réalité, est une constante physique parfaitement stable. Si le temps ne s’accélère pas, que cache ce sentiment qu’il n’est pas possible d’ignorer ? Ce sont en fait trois accélérations qui nous donnent ce sentiment diffus que nous avons moins de temps :
l’accélération du nombre de données et informations disponibles ;
l’accélération de l’accès aux données et informations ;
l’accélération de la transmission des données et informations.
L’augmentation du nombre de données, de leur vitesse d’échange et la multiplication des moyens d’accès se combinent dans une addition de trois exponentielles dont on ne mesure pas l’impact, mais qui, de façon certaine, accélèrent la vitesse de changement du Monde.
La révolution du monde de la donnée, en permettant un accès facilité à la connaissance, nous aide pour réduire la partie complexe[1] d’un problème au profit d’un compliqué qui sera toujours plus abordable. Il y a cependant deux conditions pour que cet outil fonctionne :
que le dirigeant confronté à la complexité ait la curiosité d’aller chercher le savoir nécessaire à réduire le champ du complexe ;
que ses biais cognitifs[2] ne le mettent pas sur une mauvaise voie dans cette recherche.
Autre point d’attention, la mythologie de l’action pour courir après le temps, vénérée par nombre de livres de management, est un piège. L’action est facile et valorisante. Se poser, ralentir et élargir son champ de réflexion est compliqué et ennuyeux, cela ne correspond pas à l’image attendue du héros et de la performance. Plonger dans l’action, voire s’y noyer, alors que l’on doit affronter une situation complexe, est un mauvais choix qui provoque chez le décideur un retour à un réflexe de base : la simplification de la réalité. En agissant ainsi, il se rassure, car il peut utiliser ses outils classiques de gestion du compliqué : la logique, le savoir-faire, l’expérience, la science, …. Mais, en simplifiant, il ampute son problème d’une partie de sa réalité. En simplifiant, il ne résout que les parties qu’il sait résoudre, il laisse de côté des pans plus ou moins importants du problème qui auront alors toute latitude pour prospérer, se développer et préparer un système chaotique incontrôlable, ou nécessitant une énergie considérable au détriment d’autres sujets.
Ce n’est pas le temps ou le nombre de choses à faire qui accélère qui crée la complexité, c’est la non-maîtrise de son espace-temps personnel qui génère un risque de perte de contrôle et de passage en mode complexe. Il devient alors important pour le manager de séparer ses temps : les temps court de l’action, celui des problèmes compliqués, et le temps long nécessaire à la réflexion et la résolution des situations complexes
Pour paraphraser une expression de Clausewitz qui parle du ”brouillard de la guerre”, il est indispensable pour un dirigeant de se tenir à distance du ”brouillard de l’info”.
À un moment où les années de travail s’annoncent plus nombreuses, où le business est toujours plus intense, où les crises se succèdent, le dirigeant doit être un marathonien. Pour tenir la distance physiquement et mentalement, il faut savoir se reposer et se protéger. Ceci passe par une vraie réflexion sur la déconnexion. À chacun, suivant ses propres rythmes, de trouver dans son quotidien son moyen de respiration lui permettant de rester lucide : sport, promenade, lecture, musique, …. C’est facile à écrire, mais, en observant autour de moi, cela ne semble pas si facile à faire tant la majorité se laisse aspirer par les vortex du quotidien. Si c’est votre cas, n’espérez pas aborder et vaincre le complexe.
Pour aller plus loin sur le sujet : le livre « Le management de la complexité » est disponible sur https://www.amazon.fr/
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Réfléchir au-delà de la pensée dominante.
Le management de la complexité 2/7
Le temps
« Rien n’est permanent, sauf le changement » nous enseignait Héraclite. Du changement à l’incertitude, il n’y a qu’un pas. Et la complexité n’est jamais très loin. Dans le livre « Le management de la complexité », fruit d’un travail de recherche de trois ans mené dans le cadre d’un DBA (Doctorate of business administration), je présente sept clés pour mieux affronter la complexité du monde actuel. Dans cet article, je propose un résumé de la 2e clé : le temps.
Combien de fois n’ai-je entendu chez des managers, dirigeants ou commentateurs que le temps accélérerait ? À les écouter, cette accélération semblait responsable du sentiment de complexité du monde actuel. Non, le temps ne s’accélère pas, ce n’est pas possible. Le temps, en tout cas la façon dont on a décidé de lui donner une réalité, est une constante physique parfaitement stable. Si le temps ne s’accélère pas, que cache ce sentiment qu’il n’est pas possible d’ignorer ? Ce sont en fait trois accélérations qui nous donnent ce sentiment diffus que nous avons moins de temps :
L’augmentation du nombre de données, de leur vitesse d’échange et la multiplication des moyens d’accès se combinent dans une addition de trois exponentielles dont on ne mesure pas l’impact, mais qui, de façon certaine, accélèrent la vitesse de changement du Monde.
La révolution du monde de la donnée, en permettant un accès facilité à la connaissance, nous aide pour réduire la partie complexe[1] d’un problème au profit d’un compliqué qui sera toujours plus abordable. Il y a cependant deux conditions pour que cet outil fonctionne :
Autre point d’attention, la mythologie de l’action pour courir après le temps, vénérée par nombre de livres de management, est un piège. L’action est facile et valorisante. Se poser, ralentir et élargir son champ de réflexion est compliqué et ennuyeux, cela ne correspond pas à l’image attendue du héros et de la performance. Plonger dans l’action, voire s’y noyer, alors que l’on doit affronter une situation complexe, est un mauvais choix qui provoque chez le décideur un retour à un réflexe de base : la simplification de la réalité. En agissant ainsi, il se rassure, car il peut utiliser ses outils classiques de gestion du compliqué : la logique, le savoir-faire, l’expérience, la science, …. Mais, en simplifiant, il ampute son problème d’une partie de sa réalité. En simplifiant, il ne résout que les parties qu’il sait résoudre, il laisse de côté des pans plus ou moins importants du problème qui auront alors toute latitude pour prospérer, se développer et préparer un système chaotique incontrôlable, ou nécessitant une énergie considérable au détriment d’autres sujets.
Ce n’est pas le temps ou le nombre de choses à faire qui accélère qui crée la complexité, c’est la non-maîtrise de son espace-temps personnel qui génère un risque de perte de contrôle et de passage en mode complexe. Il devient alors important pour le manager de séparer ses temps : les temps court de l’action, celui des problèmes compliqués, et le temps long nécessaire à la réflexion et la résolution des situations complexes
Pour paraphraser une expression de Clausewitz qui parle du ”brouillard de la guerre”, il est indispensable pour un dirigeant de se tenir à distance du ”brouillard de l’info”.
À un moment où les années de travail s’annoncent plus nombreuses, où le business est toujours plus intense, où les crises se succèdent, le dirigeant doit être un marathonien. Pour tenir la distance physiquement et mentalement, il faut savoir se reposer et se protéger. Ceci passe par une vraie réflexion sur la déconnexion. À chacun, suivant ses propres rythmes, de trouver dans son quotidien son moyen de respiration lui permettant de rester lucide : sport, promenade, lecture, musique, …. C’est facile à écrire, mais, en observant autour de moi, cela ne semble pas si facile à faire tant la majorité se laisse aspirer par les vortex du quotidien. Si c’est votre cas, n’espérez pas aborder et vaincre le complexe.
Pour aller plus loin sur le sujet : le livre « Le management de la complexité » est disponible sur https://www.amazon.fr/
Michel MATHIEU – Mars 2024
Doctor of business administration
[1] Voir l’article 1/7
[2] Voir l’article à venir 6/7
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